Février 2008, sous les arcades, un ancien commerce aménagé en garçonnière, est le siège d’une activité pornographique clandestine. 

L'entrée principale et l'accès à l'arrière-boutique encadrent la vitrine occultée par des rideaux.

La porte s'ouvre. À droite, accrochée au mur, une étagère, où sont rangés des films pornographiques, surplombe la tête d'un grand lit. À gauche, face au lit, un meuble large et bas, supporte la télévision, le caméscope, le magnétoscope, l'imprimante et l'ordinateur. Entre le meuble et le lit, un espace permet de traverser la chambre jusqu'à un petit escalier, qui donne sur la porte de la cuisine, qui occupe l'emplacement, jadis, réservé à l'arrière-boutique. À droite, une porte relie la cuisine à un couloir. L'une des extrémités dessert les commodités, et l'autre la porte à droite de la vitrine.

Le locataire a la quarantaine, plutôt grand, bien bâti et avec une légère surcharge pondérale. De tempéramment impulsif, il est droit, devant la porte, dans un calme apparent. Deux femmes l'accompagnent de part et d'autre. Perchées sur leurs talons, elles sont de tailles modestes, et ont du mal à dépasser ses épaules. 
Ses mains sont menottées derrière son dos : la mère de sa victime vient de porter plainte. 

La perquisition va commencer. 

Les deux femmes sont officiers de la Brigade des mineurs. Leur efficacité est redoutable. Elles le maîtrisent sans peine dès qu'il tente la moindre échappée.

L'homme appartient à une communauté religieuse patriarcale, qui, sous des moeurs très strictes, cache son lot d'hypocrites et de pervers. C'est d'ailleurs sur leurs vices qu'il a fondé son commerce.

Son activité débuta par la distribution de copies illégales de films pornographiques. Un travail simple qui se réumait à louer une cassette pour une soirée, la visionner pendant que l'ordinateur, branché au magnétoscope, le copiait sur un disque dur externe, et numériser la jaquette de la pochette à l'aide de l'imprimante, qui faisait aussi scanner. 
Dès qu’un client voulait un film, il enregistrait sur une bande vierge la copie, imprimait la jaquette, et lui vendait la cassette fraichement contrefaite. L’affaire était plutôt rentable. 

Les cassettes cédèrent la place au DVD, dont l'interactivité propulsait le spectateur directement à la scène voulue.

Il investissa alors dans un logiciel de montage vidéo, qui le transposa de simple producteur à réalisateur. Il monta ses propres bandes d'annonces en compilant des extraits de sa filmothèque, et en y incrustant quelques effets visuels.
 
À cette époque, il était en ménage avec une femme qui avait des enfants d'un précédent mariage. 

La fille ainée n'était pas encore pubère, quand par jeu, elle offrit son intimité à l'oeil froid d'un appareil photographique, qu'elle cru, au début, simplement malicieux. L'obturateur en moins d'un clin d'oeil, lui vola toute son adolescence et la blessa au plus profond de sa vie de femme. Le cliché qui en sortit, devint, pour elle, son billet pour l'enfer, et pour l'homme, son certificat d'aptitude au métier de méteur en scène.

Armé d'une caméra, il fixa sur des kilomètres de bande, toute la vie intime de la fillette. Si elle refusait de poser, il la menaçait de montrer la photographie à sa mère. De honte et de peur, elle s'exécutait.

Il la filmait sous la douche, aux toilettes, ou dans son lit, mais toujours dénudée, et ce, dans la maison familiale, à l'insus de la vigilence de la mère.
Puis, il cachait son butin dans l'ordinateur de son repaire, où il visionnait et manipulait chacun des courts métrages. Tantôt il extrayait une image pour agrandir un détail. D'autres fois il compilait les rares extraits où ses centres d'intérêts étaient bien visibles. Bref, là où il se délectait, elle, elle souffrait.

La fillette grandit et devint pubère. L'homme décida alors d'élargir ses compétences en entreprenant une carrière d'acteur. 

Il la força à le rejoindre sous les arcades. Il commença par le petit jeu habituel, puis, il posa la caméra sur le meuble face au grand lit. La télévision fut branchée pour servir d'écran de contrôle, et à l'aide de la télécommande, il pilota le camescope. La jeune fille eut sa première fois en vidéo.

D'autres suivront, avec toujours le même scénario : rendez-vous chez lui, déshabillage, film, et habillage. Si par hasard elle se refusait, alors, il arrêtait la caméra à l'aide de la télécommande, et la frappait jusqu'à ce qu'elle cède. Une fois les larmes sèchées, la prise de vue reprennait.

Les films réalisés montrent deux corps sans émotion, se livrant inlassablement à la copulation : des gestes mécaniques, dans une ambiance pasteurisée, glorifiant un égo de plus en plus démesuré.

Une fois qu'elle était partie, il manipulait tous les films avec son logiciel. De la même façon qu'un fétichiste va associer le toucher au détail d'une odeur dans un bas ou une culotte, lui le faisait avec la souris et ses yeux, dans les images.  

Mais la religion n'est pas Dieu, et tout adepte qu'il était, il ne fut pas protégé. Alors que le premier long métrage allait être proposé à la vente, la jeune fille fouilla discrétement la chambre et trouva la maudite photographie. Elle s'en empara et avec elle comme preuve, expliqua à sa mère son calvaire, stoppant net la carrière de l'homme.